Université Félix Houphouët-Boigny.
La nature sait nous avertir par un signe précis, dans notre marche, qu’un pas radieux vient d’être accompli : ce signe, c’est la joie. La joie se distingue de la simple satisfaction. Gabriel Marcel souligne que la satisfaction se déroule entre quatre murs, dans ce qui est clos, tandis que la joie se déploie à ciel ouvert. A ciel ouvert ! De manière soudaine, quelque chose en effet n’est-il pas venu faire irruption dans l’instant afin de l’illuminer, dénouant par la même occasion de l’intérieur notre être et l’ouvrant subtilement sur l’immensité de l’horizon du monde ? Comment ne pas inscrire au ciel de la Côte d’Ivoire le lundi 16 juillet 2018 comme une date infiniment destinale ? Ce jour, il a été allumé le feu constituant le RHDP en tant que Parti Politique.
Chacun de nous sait que notre pays vient vraiment de loin. N’a-t-il pas connu une crise qui a failli le défigurer de fond en comble pour lui confectionner un habit hideux ? Prévalait en effet un patriotisme instinctif, sans concept, fait de la bouillie du cœur, oubliant que la République est la communauté des hommes raisonnables, soucieuse de paix, de fraternité et d’ouverture sur l’universel. Si la Côte d’Ivoire, malgré cet enfoncement dans l’obscur, a pu rester debout, c’est qu’elle était assise sur des fondations solides, œuvre d’un grand bâtisseur, le Président Félix Houphouët Boigny. Dans un sursaut, des hommes se reconnaissant en lui et soucieux d’assurer l’héritage de son œuvre, se sont unis. A ceux qui ont des yeux pour voir, il suffirait, sans un grand effort, de les simplement ouvrir pour réaliser qu’en quelques années seulement, le pays s’est transformé grâce à cette alliance. Sans doute, tout n’est pas parfait. Ainsi que le dit Johann Gottlieb Fichte, « si tout était déjà comme il devrait être, on n’aurait même pas besoin de toi dans le monde, et tu serais resté tout aussi bien dans le sein du néant. Réjouis-toi de ce que tout n’est pas tel qu’il devrait être, d’avoir du travail et de pouvoir être utile à quelque chose ». Toute œuvre humaine est toujours à parfaire. Cependant, ce qui a été déjà réalisé ne manifeste-t-il pas en clarté sa propre évidence, comme la rose offrant en toute gratuité son parfum, ou la flamme d’une bougie dansant bellement dans le vent que seul pourrait refuser d’apprécier celui qui a perdu le sens de l’intimité silencieuse des choses ?
Pour parvenir à l’étape majeure de la constitution du Parti Unifié, il faut avouer que l’arc a été tendu depuis plus d’une dizaine d’années, et qu’il était temps de libérer désormais la flèche vers sa destination car, autrement, la corde risque de perdre de sa souplesse et de sa vitalité pour ne plus finalement pouvoir exercer le moindre mouvement. Il était opportun d’élever à l’effectivité l’Alliance des Enfants du Président Félix Houphouët Boigny en lui conférant substantiellement un corps sous la forme et le contenu d’un Parti Politique. Dans la situation actuelle des choses, comment ne pas reconnaître qu’il n’est pas de perspective autre que celle du RHDP pour assurer Stabilité, Force et Paix à notre pays, en vue d’un développement prolongeant le geste initié par son premier bâtisseur, en le portant encore plus loin et plus haut ?
Lors de l’Assemblée Constitutive du 16 juillet 2018, il a été affirmé dans l’unité du cœur et de la raison, avec Force, Sagesse et Beauté que la création du Parti Unifié vient dire les retrouvailles scellées des Enfants du Président Félix Houphouët Boigny, que l’union est toujours fructueuse et la désunion, dispendieuse, et que nous devons bâtir, non pour immédiatement tout consommer, mais dans le souci de léguer aux générations à venir les conditions d’une existence épanouissante, une Nation de paix, de justice et de solidarité. L’expérience de la vie nous enseigne combien reste gravé dans l’esprit et le cœur ce qui passe par les yeux et les oreilles. Les témoins de cette Assemblée au SOFITEL Hôtel Ivoire Abidjan ont pu réaliser avec beaucoup d’émotion que le RHDP est, au plus haut point, un hommage à celui qui a su établir les colonnes et les assises de notre pays. Un hommage est l’expression de la mémoire du cœur voulant accueillir dans le temps qui passe, la trace profonde d’une présence qui s’est retirée en ne cessant, du même mouvement, de nous tirer à elle. Est-ce d’ailleurs un hasard si, sur ce point, le mot ECART a pour anagramme parfait TRACE ? Ce qui a été mis à l’écart est bien ce qui, à sa manière, laisse une trace que le temps ne saurait effacer… Le Président Félix Houphouët Boigny s’est retiré de notre regard sensible depuis plus de deux décennies, mais il ne cesse d’être présent dans l’aventure historique de notre pays car dans le fond, nous ne ferons toujours que porter un coup de marteau de plus sur du fer qu’il a sagement forgé avant nous, et avec lequel un autre après nous labourera la glèbe.
Un point fort de cette Assemblée Constitutive a été d’entendre le Président de la République dire qu’il faut œuvrer à transférer en 2020 le pouvoir à une nouvelle génération. Une personne animée d’un tel souci ne révèle-t-elle pas qu’elle a une vue haute et noble de la chose politique saisie essentiellement comme une manière d’être au service des autres, l’acte de nourrir de notre jeûne leur faim et de leur ouvrir la porte d’un avenir humainement accomplissant ? Une société qui n’a pas d’avenir à se mettre sous la dent ne pourra que tourner en rond, sur elle-même. Ne trouvant rien, elle sera condamnée à dévorer son propre présent jusqu’à se dévorer soi-même.
Le PDCI-RDA, ce grand Parti Politique qui nous a tous utilement nourris sans jamais se dévorer, sait que la source d’eau vive ne doit jamais être abandonnée au profit de citernes fissurées incapables de retenir l’eau. Il sait que seul le mauvais dattier va chercher le roseau stérile. Le Président Bédié, au plus profond de lui-même, ressent que le Rassemblement des Houphouétistes pour la Démocratie et la Paix est un beau cadeau que nous offre la bienveillance amicale du destin, afin que les raisons d’unir soient toujours plus fortes que celles de diviser et de séparer. Renouvelés, nous pourrons « forger, unis dans une foi nouvelle, la patrie de la vraie fraternité ». Alors notre pays, la Côte d’Ivoire sera à l’image de cette gerbe de blé dont parle le rêve de Joseph[1] qui, liée, se dresse et reste debout, entourée par d’autres gerbes s’inclinant devant elle.