Côte d’Ivoire : Il faut organiser des élections apaisées et démocratiques en 2015

La Côte d'Ivoire est encore convalescente et elle ne survivra pas à une autre crise post-électorale: Il faut changer de cap et organiser des élections apaisées et démocratiques en 2015. Évitons le détricotage du système politique ivoirien!

La conscience humaine de notre peuple ne tolérera pas que l'on réveille ou accentue des haines recuites. C'est pourquoi il faut un sursaut républicain de haute conscience et forte intellectualité de ses acteurs politiques.

La république c'est la loi du peuple et non la volonté de quelques médiocres et irréductibles faucons, "gabégeurs", imbus d'égoïsmes minables, manipulateurs notoires de chefs d'État, accentuant et profitant des moments de division, à la casquette de politiciens et géographiquement minoritaires. Notre pays est encore convalescent et il ne survivra pas à un autre contentieux post-électoral. Il est donc urgent d'opérer deux actions fondamentales: une nouvelle équipe de gouvernance et un environnement pré-électoral apaisé qui passe par un consensus juridique sur les règles d'organisation des élections de 2015 et de proclamation des résultats électoraux. Faire en sorte de créer un contexte électoral inattaquable et incontestable.

Les circonstances actuelles exigent une nouvelle équipe gouvernementale en Côte d'Ivoire, plus resserrée, davantage rajeunie et avec une bonne représentation féminine. Les trois quarts de l'actuel cabinet gouvernemental doivent être mis en vacances. Ce gouvernement devra être piloté par un nouveau premier ministre d'une cinquantaine d'années et qui a les énergies physiques et intellectuelles suffisantes pour relever le défi de l'émergence. Ce qui passe par l'apaisement du climat socio-politique, l'enrayement du grand banditisme dont la prolifération des coupeurs de route, l'effectivité du désarmement, l'opérationnalité de la réinsertion socio-professionnelle des ex-combattants, l'organisation d'élections démocratiques en 2015, la conduite du chantier de la reconstruction infrastructurelle de la Côte d'Ivoire et la réalisation de l'assainissement fonctionnel et financier de l'administration ivoirienne. C'est un impératif catégorique de solder toutes les affaires judiciaires relatives au dernier contentieux électoral avant le 1er mars 2015 afin de ne pas donner l'impression de parasiter le processus électoral d'octobre 2015, tout en forgeant un consensus juridique sur les règles d'organisation des élections et surtout sur le mécanisme de dépouillement et de proclamation des résultats électoraux.

Comme tous les autres pays du Sud, la Côte d’Ivoire a été invitée à s’engager, au début des années 1990, dans un processus visant à faire évoluer son mode de gouvernance vers un modèle que les pays du Nord considèrent comme universel : la démocratie à l’occidentale. En même temps, elle devait construire une forme d’identité nationale à l’intérieur de frontières héritées de la colonisation. L’exercice s’est avéré si compliqué que le pays a implosé. Les incompréhensions et les malentendus, réels ou feints, qui ont entouré la mise en place du processus démocratique en Côte d’Ivoire ne doivent pas prendre l'allure d’une greffe qui a du mal à prendre. Les miracles sont possibles, mais il ne faut pas rêver inactivement.

Crédibilisons davantage la gouvernance publique, notre système politique et essayons de voir comment nous pouvons, malgré les rancœurs des uns et des autres, aider ce pays, en surveillant les actions des dirigeants actuels, à permettre aux pauvres citoyens de profiter un peu, avant leur mort, des richesses incroyables de notre patrie. Sortons des rituels de manipulations de l’opinion publique, la société civile, des journalistes et des magistrats qui sont une menace pour l’avenir du pays, car on ne ruse pas avec la démocratie et ses règles. Les nouveaux peuples sont vigilants et n'hésitent plus à se battre pour contrôler la responsabilité de leurs dirigeants, leurs actions, et, au besoin, à les bouter hors du palais. Gouverner démocratiquement, c'est faire en sorte que le panier de la ménagère s'étoffe, que les jeunes trouvent un emploi en lieu et place de rivaliser dans une forme de technicité criminelle grandissante (phénomène des brouteurs, bande des gnambro à Abobo…etc), que les filles soient scolarisées, que les femmes, les jeunes et toutes les grandes compétences nationales aient plus de responsabilité dans la gestion des affaires publiques, que les partis politiques financés en partie avec l’argent public transmettent de vraies valeurs aux citoyens et arrêtent d’être des clans ethniques et des clubs de soutien aux actions d’individus conduisant, même avec netteté, la barque dans un gouffre.

Le monde entier observe avec grande curiosité et beaucoup d'attention l'éventuel sursaut intransigeant et rigoureux des acteurs politiques ivoiriens face aux multiples suspicions qu’incarne le processus électoral qui se met en place. L’exigence des conditions préalables est un devoir universel légitime et primordial de tout un peuple qui veut aller aux élections dans un contexte démocratique. Sans respect des préalables électoraux, il ne peut y avoir d’élections crédibles et apaisées. Il ne peut y avoir un régime démocratique responsable. En d’autres termes, le moindre refus de garantir et de faire respecter les élémentaires préalables électoraux indispensables équivaut à un refus manifeste d’organiser des élections libres et transparentes, dans un processus crédible et apaisé.

Voilà quelques préalables électoraux afin d'éviter que les signaux passent au rouge et organiser des élections crédibles et apaisées : L’audit du fichier électoral ; La validation collective et la publication de la liste électorale avant le dépôt des candidatures ; L’implication de l’Opposition politique dans la gestion du serveur central ; La mise en réseau des centres, bureaux et serveurs ; La sécurisation du processus électoral; La publication de toutes les opérations qui ont lieu et l’impression des bulletins de vote ; La formalisation d'un cadre de concertation électorale constitué de personnalités crédibles rompues à la sagesse coutumière, religieuse et au savoir juridique ; L’indépendance effective et réelle de la CEI (Commission Électorale Indépendante), même si la reconduction de monsieur Youssouf BAKAYOKO à la tête de cette institution est une regrettable erreur de casting politique.

À défaut de respecter et de garantir ces préalables élémentaires incontournables, on aura mis volontairement à mal tout le processus électoral, hypothéquant ainsi sa crédibilité, en ouvrant les portes d'une prochaine crise post-électorale.

Toutes les Forces Vives de la Côte d'Ivoire sont appelées à demeurer fermes et intransigeantes face aux cafouillages stratégiques afin de prévenir un autre chaos post-électoral et garantir, dans des conditions requises, le droit électoral élémentaire pour le peuple ivoirien, pour le renforcement de la cohésion pacifique de la nation toute entière, au bénéfice de tous. Ces défis vitaux doivent être relevés par tous sans complaisance, en toute responsabilité, avec honneur et dignité. Impliquer la société civile dans des initiatives citoyennes en faveur des acteurs politiques et des populations en vue de combler le manque de culture démocratique: développer une véritable pédagogie sur les notions de verdict des urnes,  de fait majoritaire, de conscience citoyenne et de respect de la volonté générale. Trop d'acteurs politiques de premier et second plans méconnaissent la science politique et sont vêtus d'ignorances démocratiques.

Un peuple averti en vaut sept fois soixante-dix-sept générations…, dit-on!

Docteur Pascal ROY

Philosophe-Juriste-Politiste-Coach politique-Analyste des Institutions, expert des droits de l'Homme et des situations de crises-Médiateur dans les Organisations-Enseignant-à l'Université-Consultant en RH-Écrivain

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