Le boycott électoral, version politique de la grève syndicale au FPI.

thumb_1809Arme politique usuelle du FPI, un parti d’anciens syndicalistes, le boycott électoral est la version politique de la grève syndicale. Ce recours récurrent au modèle de la lutte syndicale dans lutte politique est le signe  manifeste de l’échec des dirigeants du FPI dans l’épreuve de conversion à la généralité  qui transforme le syndicaliste ou l’avocat en individu-général, en homme politique défenseur de la généralité sociale et serviteur de la société globale. Un Lech Valesa et ses compagnons en Pologne, un Lula et ses compagnons au Brésil, un Nelson Mandela réussirent à se convertir en politiciens, c’est-à-dire précisément en individus-généraux au service de la société globale, luttant pour promouvoir une société d’inclusion, de liberté et d’égalité.

Navigant à vue, du socialisme autoproclamé à l’ethno-nationalisme pratiqué, du panafricanisme autoproclamé à la xénophobie adoptée, de l’anticolonialisme et de l’anticapitalisme autoproclamés à la complicité active avec les anciennes puissances coloniales et les multinationales capitalistes, le FPI est resté une organisation corporatiste de la société civile mue par ses intérêts privés, un syndicat dévoyé égaré dans la politique. Dénué de projet de société et de programme politique clairs à destination de la société globale, il reproduit au niveau de la société politique et de l’Etat, les réflexes servant à défendre les intérêts particuliers corporatifs des organisations de la société civile.

Spécifique au FPI, le boycott électoral est, en fait, une grève électorale,  c’est-à-dire une grève politique contre-nature. La contestation politique est, au FPI, reconfigurée selon le modèle syndical. La grève électorale tient lieu de mode d’opposition politique au gouvernement. Elle remplace la contestation argumentée du pouvoir qui s’effectue toujours, en démocratie, au moyen d’une idéologie politique, d’un projet de société et d’un programme politique partisan alternatifs élaborés à partir des besoins de la société globale.

Redéfinie selon le modèle de la lutte syndicale, l’opposition politique du FPI se réduit au boycott électoral, au refus de participer à la déclaration de la volonté général, aux tentatives de l’empêcher par la force. De même que l’objectif ultime du syndicaliste est de s’opposer au patronat ou à l’Etat au moyen de la grève professionnelle pour défendre ses intérêts particuliers corporatifs, l’objectif ultime du syndicaliste-politicien est de s’opposer au gouvernement au moyen de la grève électorale pour réclamer le pouvoir d’Etat. Reconfiguré selon les objectifs de la lutte syndicale, l’objectif ultime de l’opposition politique du FPI, est de revendiquer le pouvoir d’Etat comme bien corporatif privé.

En l’an 2000, des syndicalistes enseignants défroqués, profitant de la confusion des repères qui prévalait dans la Côte d’Ivoire de cette époque troublée, parvinrent à s’accaparer le pouvoir d’Etat au terme d’une élection calamiteuse. Ils transposèrent au plan politique, la culture de la grève syndicale et de la défense des intérêts privés corporatifs. L’incapacité étonnante des anciens syndicalistes enseignants du FPI à élaborer un programme politique et un projet de société correspondant aux demandes de la société globale, tient au fait que leur action politique demeure modelée par l’action syndicale fonctionnellement orientée vers la représentation et la défense d’intérêts particuliers corporatifs. Ce modèle syndical a donc déterminé leur manière d’exercer le pouvoir quand ils parvinrent à le conquérir.

 Aux manettes de l’Etat, les syndicalistes qu’ils étaient restés servirent leurs propres intérêts, à défaut de pouvoir servir les intérêts corporatifs de la catégorie professionnelle, le corps enseignant qu’ils avaient instrumentalisé afin d’utiliser la société comme ressource politique pour accaparer le pouvoir d’Etat. Face à la contestation sociale, ils agirent suivant le modèle du rapport de force opposant les syndicats  au patronat ou à l’Etat par gardes républicaines interposées. Pour défendre, en tant que nouveaux patrons politiques, leurs intérêts particuliers de catégorie sociale dominante, ils utilisèrent la répression militaire et les forces de sécurité contre les revendications sociales et politiques de la population.

Dans le fond et dans la forme, la praxis gouvernementale du FPI fut, de part en part, déterminée par le modèle syndical de défense des intérêts particuliers corporatifs qui fut bientôt dévoyée en service des intérêts privés des membres de la classe dominante de nature oligarchique qu’ils devinrent dès leur accession au pouvoir d’Etat . Le modèle social et le projet de société inavoué qui dirigèrent et qui continuent de diriger sa praxis politique fut déterminée par la transposition de ce modèle syndical dévoyé au plan politique. Le combat du FPI  contre l’identité citoyenne est de nature syndical. La forme citoyenne de l’identité, la forme républicaine de l’Etat, le régime démocratique, attaquent ses intérêts catégoriels de classe dominante. Le forme communautaire de l’identité, le modèle ethnique et confessionnel de l’Etat, protègent au contraire comme nous le montreront dans la suite de notre propos, ses intérêt privés de classe. L’objectif ultime de l’appel au boycott électoral est donc d’instrumentaliser la population pour  protéger le modèle social et politique fermé sur lequel repose sa domination. L’appel du FPI au boycott du référendum constitutionnel est une tentative de récupération partitocratique de la souveraineté du peuple pour protéger la constitution identitaire de l’an 2000. De nature syndical et corporatiste, cet appel n’est nullement l’expression d’une opposition démocratique à une dérive monarchique et à un  quelconque arbitraire du pouvoir.

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