Combattre AQMI avec les valeurs de la République, des Cultures et des Religions.

AQMI est un égrégore.

AQMI, comme nous l'avons démontré,  est un non-être, un égrégore. Il vit de nos démissions et de nos abdications. L'inefficience, historiquement attestée,  de la solution militaire, de la force matérielle brutale,  contre ce néant,  procède de la nature foncièrement inconsistante de l'entité qui vient de nous agresser  à Grand-Bassam en nous utilisant contre nous-mêmes. Quand nous disons « nous », nous nous comprenons dans ce pronom personnel à la fois comme Ivoiriens et Africains. Nous nous comprenons comme communauté sociale et politique intégrée en un ensemble régional par un sentiment d'appartenance commune.

Des quatre coins du monde, de l’Europe, du Proche et Moyen Orient à l’Afrique Noire et Blanche,  la résilience de Daech, d’Al Qaeda, et d’AQMI, ces phœnix du mal,  qui renaissent de leurs cendres après avoir été anéantis par le feu des mitrailleuses, des missiles, des bombes et des grenades, dit éloquemment l’inefficience  de la solution militaire et sécuritaire exclusive que nous sommes tentés de privilégier en Afrique Noire sans les augmenter par l’indispensable autorité morale.  

Nos armes les plus efficaces  contre AQMI, égrégore incarné par un groupuscule d'individus faibles et impuissants nourris de  la force de notre propre liberté dévoyée, ne peuvent donc être que des armes économiques, sociales, politiques, spirituelles et morales. L'appel solennel du Président de la République Alassane Ouattara  à ne pas céder à la peur, à cheminer  opiniâtrement dans la voie du progrès économique social et politique est un appel  à mobiliser de telles armes pour nous opposer efficacement à cette entité. Contre un égrégore la force militaire et policière n’est efficace que si  elle est augmentée par l’indispensable autorité morale. 

En quoi consistent donc, nominativement et concrètement, ces armes appropriées,  infiniment plus efficaces que la force militaire la plus brutale ? Pour rappeler cette évidence, est-il besoin de souligner que l'égrégore terroriste AQMI est né, en réalité, de la destruction régionale de nos armes sociales spirituelles et morales intérieures et de la corruption politique qui s’ensuivit ?  La liberté politique durement acquise de nos jeunes États par les guerres d’indépendance et les mouvements populaires de libération fut dévoyée vers l'oppression endogène, la domination et l'exclusion de catégories entières de nos corps sociaux. Ne faut-il pas souligner à ce propos que la violence bestiale et la barbarie de nos guerres civiles qui, bien avant l’apparition de l’égrégore AQMI,  déchirèrent nos Etats et continuent encore de le déchirer dans nos démocraties naissantes,  provient de cette aliénation de nos forces internes et de cette abdication ? 

Voici les armes pour le combattre

Nos armes intérieures  contre AQMI sont donc les forces spirituelles organiques et les valeurs primordiales qui permettent à un corps politique, diversifié et pluriel comme le sont nos sociétés multiethniques et multiconfessionnelles, de vivre, d’exister  et de se perpétuer, de se transformer dans le temps tout en conservant son unité

 Nos armes politiques sont la conscience de la citoyenneté, le sentiment républicain et la conviction laïque.  Notre arme sociale est la mémoire culturelle qui nous définit chacun comme être à la fois  particulier et générique,  simultanément  situé dans une communauté ethnique, confessionnelle et politique coordonnée par des valeurs dialectiquement complémentaires. Nos armes intellectuelles sont la raison individuelle et la raison publique. Nos armes morales sont la conscience de notre liberté irréductible d'être humain, la liberté  interne et externe qui permet à l’individu et aux collectivités humaines de résister à toutes les formes de dominations morales et matérielles.

Mobiliser ces armes   contre AQMI, c'est mobiliser   dans un combat existentiel  contre un égrégore politique malfaisant,  les forces interne et externes d’un organisme  politique et social constitué. C’est chacun, en appeler  en soi aux forces de l'Homme intérieur et de l'Homme extérieur. C'est  recourir aux  ressources internes  d’un Etat juridique et d’une communauté  éthique, ressources constituées à la fois par le droit positif et par les coutumes. C'est s’adosser aux ressources morales et spirituelles des communautés primordiales en tant qu'ethnies et en tant que confessions religieuses. C'est mobiliser les valeurs morales et spirituelles de la République. C’est rebâtir, en nos sociétés pluriethniques et multiconfessionnelles, nos corps politiques démocratiques  comme des châteaux forts imprenables  unifiés dans la diversité de leurs composantes internes.      

L'accès à ces armes intérieures, accès qui consiste à nous réapproprier nos forces internes abandonnées et aliénées à un non-être hostile et dévorant, passe par un mouvement réflexif autocritique qui nous permette de nous libérer de l'emprise de l'hétéronomie et des logiques d'extraversion pour rentrer en nous-mêmes comme individualités autonomes.

 Comment  la conscience de la citoyenneté,  le  sentiment républicain et la conviction de laïcité permettent-ils de résister aux forces de mort d’AQMI? Comment la mémoire culturelle, la raison individuelle et publique, la conscience de la  liberté interne et externe sont-ils les armes les plus efficaces qui  permettent de briser et d’éliminer l’égrégore? (A suivre)

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