UA-UE. Investir dans la jeunesse : une signification symbolique.

Au-delà de sa signification littérale économique, la thématique du 5ème Sommet UA-UE doit être aussi entendue dans sa signification symbolique. Elle en appelle à une transformation qualitative volontariste de nos corps politiques et à un changement social de fond. Ce changement qualitatif est requis par les évolutions internes et externes de notre environnement économique, social et politique. La jeunesse symbolise la vitalité, le dynamisme, l’énergie créatrice, l’inventivité, l’innovation, le renouveau, la durabilité. Elle s’oppose à la vieillesse qui évoque, au contraire le passé, la sclérose, la faiblesse, l’inefficience, l’obsolescence, la dégénérescence et la mort.

En appeler à investir dans la jeunesse pour un avenir durable, c’est en appeler symboliquement à revitaliser le présent, et à initier un nouveau commencement historique ; c’est demander de révoquer les structures et les logiques du passé pour initier un nouveau départ historique en matière de représentation du politique, de l’économique et du social ;

c’est en appeler à abroger les systèmes et les structures du passé pour inventer des formes inédites répondant aux besoins des temps nouveaux. C’est demander de remplacer les anciens régimes par de nouveaux régimes permettant de résoudre les problèmes actuels  auxquels ne répondent plus les structures et les solutions du passé.

En appeler à investir dans la jeunesse pour un avenir durable, c’est demander de placer le capital d’historicité de la société dans ses forces vives internes d’innovation, autrement dit dans la catégorie sociale qui, n’étant pas comptables du passé, est à même d’inventer un nouvel avenir, de concevoir de nouvelles structures correspondant aux besoins spécifiques de la société, d’initier un nouveau départ porteur d’espérance.

La signification symbolique de cette nouvelle profession de foi fait donc ressortir cette idée essentielle : ce changement qualitatif de la société, qui en appelle aux forces du progrès, ne peut pas être le fait de la frange de la jeunesse qui, ayant intériorisé les anciennes logiques, reproduit, dans ses manières de penser et d’agir, les normes de l’ancien système frappé d’obsolescence. Le changement social ne peut pas être le fait de la frange de la jeunesse qui ne conteste les anciens équilibres structurels qu’en vue d’instaurer un nouvel équilibre de pouvoir à son profit, de revendiquer des postes dans le système politique et l’Etat pour se servir, d’y rénover les logiques patrimoniales et prédatrices du passé.

Entendue comme vitalité créatrice, la jeunesse ne saurait être exclusivement identifiée à l’âge physique situé entre l’enfance et la maturité. Il ne suffit pas d’être physiquement jeune pour incarner la créativité, porter l’innovation et l’espérance. Il faut être moralement, spirituellement et intellectuellement jeune. Il faut pouvoir formuler des projets de société inédits et novateurs. Le trait spécifique de la jeunesse, par rapport à la vieillesse, est l’aptitude à la distanciation critique qui permet de mettre constamment en question le présent en vue de l’avenir. C’est la vitalité et l’énergie interne qui permettent à l’humain de se dépasser, par une pression sur soi, pour se construire dans la durée en poursuivant des idéaux d’émancipation. La jeunesse est, de ce point de vue, l’actrice éminente du changement social. Elle est considérée comme force d’avenir capable de briser les logiques de reproduction pour initier, dans la société, une dynamique de production. Elle est vue comme énergie créatrice, capable d’inventer de nouvelles logiques et de nouvelles structures susceptibles de faire advenir un nouveau présent. Elle constitue, dans le corps social, la force vitale de rénovation à même d’adopter les nouvelles valeurs qu’imposent les mutations historiques, de proposer des projets de société inédits et novateurs, de transformer les structures pour construire le présent et porter encore loin l’espérance de la durabilité.

De manière concrète, demander d’investir le capital d’historicité de nos sociétés dans la jeunesse, c’est en faire la force opérationnelle de l’ancrage des normes et des nouvelles  logiques démocratiques qui permettront de révoquer les anciennes structures pour construire l’avenir. La réappropriation subjective de ces nouvelles valeurs instaurera pleinement les conditions politiques qui permettront de transformer l’économie de marché en développement endogène, source d’emplois de qualité, d’émancipation personnelle  et d’espérance pour la jeunesse.

L’appel à investir le capital d’historicité de nos sociétés dans la jeunesse, entendue comme force active de renouvellement, est, en cela, un appel à investir économiquement dans l’éducation comprise, à la fois, comme éducation aux valeurs des nouveaux régimes démocratiques et formation à la maîtrise de la nouvelle rationalité instrumentale. C’est à cette unique condition que la transformation de notre présent et la construction d’un avenir durable pourront être espérées.

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