Côte d’Ivoire : Partis politiques ivoiriens, présentez-nous vos cartes d’identité.

Citoyens ivoiriens, nous sommes plus que jamais appelés au devoir de vigilance. Nous devons exiger de notre classe politique les identifications partisanes et les clarifications idéologiques requises par le jeu politique démocratique. En démocratie, il est du devoir du citoyen de veiller sur la chose publique et de se sentir responsable de son gouvernement. Cette vigilance critique citoyenne est plus que nécessaire pour sauvegarder la paix sociale et la stabilité politique en notre pays.  Phénomène inédit, jamais vue dans aucune démocratie du monde, la campagne électorale pour la Présidentielle 2020 est officieusement déjà lancée, à trois années d’écart de la date officielle. Inaugurée par une guerre absurde de succession, la précocité du phénomène signifie que les passions sont exacerbées, que la désinformation risque de se substituer à l’information, et que sur le long terme, le viol des foules par la propagande politique tentera de circonvenir les électorats ivoiriens. La vigilance critique individuelle et collective est donc de mise.

Il importe de contribuer à la formation d’une opinion publique responsable qui puisse préserver la déclaration de la volonté générale et qui puisse la protéger contre toute tentative de déformation et de capture factionnelle. Cette vigilance critique nous permettra d’éviter une réédition de la catastrophe de la présidentielle de l’an 2000 dont 2010 ne fut que la conséquence logique.

En l’an 2000, le triomphe du populisme identitaire résulta de notre torpeur collective. Cette torpeur permit à des partis politiques de tromper les électorats ivoiriens, de dissimuler le nationalisme identitaire sous les masques du patriotisme d'Etat et du socialisme alors même que les discours et les pratiques témoignaient du contraire. Renforcée par les vitupérations identitaires et par l’anticolonialisme d’opérette, la personnalisation de l’affrontement politique ivoirien et la reviviscence de la conscience tribale des peuples firent oublier la République.  Cette déficience de la vigilance critique citoyenne facilita l’escroquerie politique qui sévit durant dix années cauchemardesques. 

Demandons donc aujourd’hui et dès maintenant à nos partis de décliner clairement leur identité politique. Toute association et tout groupement politique est soumis au principe d’identité. Il importe d’identifier précisément les acteurs de l’échiquier politique ivoirien. La question des obédiences partisanes, de leurs bases sociales, de leurs programmes et de leurs projets sociétaux est donc vitale. Qui est de gauche?  Qui est de droite ? De quel type de gauche s’agit-il ? De quel type de droite s’agit-il ? Qui est socialiste ? Qui est libéral ? Qui est écologiste ? Qui est communiste ?

Prétendant à l’exercice du pouvoir, les partis et les candidats sont obligés de s’identifier socialement et politiquement. Ils doivent déclarer leur définition sociale et décliner leurs obédiences idéologiques ainsi que les grandes lignes de leurs programmes politiques et économiques respectifs. De quelles catégories socio-professionnelles sont-ils les représentants ? Quels intérêts sociaux servent-ils  et quelles valeurs défendent-ils ? Quels sont leurs projets sociétaux ?

Un regard panoramique critique jeté sur notre histoire récente, nous oblige à constater que l’identité idéologique et axiologique de nos partis politiques s’est brouillée. La mutation étonnante du parti socialiste ivoirien (FPI), parti-phare de la gauche ivoirienne, en parti identitaire d’extrême droite, en est la manifestation spectaculaire et symptomatique. La représentativité de nos partis politiques s’est ethnicisée et communautarisée.

La personnalisation de notre affrontement politique et la crise subséquente de notre opposition politique sont les symptômes emblématiques d’une errance de notre raison publique qui menace constamment de réduire à néant les acquis politiques et économiques de notre démocratie. Certains parmi nos acteurs politiques en sont à assimiler notre régime politique actuel à une dictature. Cette grave confusion souligne, s’il en était besoin, l’urgence de la clarification du débat ivoirien et de la refondation idéologique sociale de notre affrontement politique.

 L’identification sociale et idéologique de nos partis politiques permettra de recentrer notre débat politique sur la confrontation des idées, des programmes politiques, des valeurs et des projets de société. Elle donnera du contenu à la liberté de choix des dirigeants par les dirigés car elle permettra à l’électeur ivoirien d’évaluer les initiatives et les opérations des acteurs politiques en les confrontant à leurs obédiences idéologiques et à leurs projets sociétaux, à leurs programmes politiques et économiques. Cette impérative et inconditionnelle identification, permettra de clarifier et d’assainir notre affrontement politique national en vue de la sauvegarde de notre intérêt général et de notre Bien commun.

 

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