Les conceptions anti-démocratiques du pouvoir, du gouvernement et du peuple en Afrique.

Représentations mentales antidémocratiques et politiques calamiteuses en Afrique. 2ème partie

  1. Les conceptions  antidémocratiques du pouvoir

1ère Quand un parti ou un acteur politique se représente le pouvoir démocratique  comme une propriété individuelle, et non pas comme une propriété collective, comme la propriété inaliénable du peuple, il le considère comme un bien dont il faut s’approprier personnellement.

 2ème Quand un parti ou un acteur politique se représente le pouvoir démocratique comme une entité réelle, et non pas comme une entité irréelle et métaphorique, il conçoit alors la lutte politique démocratique comme un combat réel mené en vue de s’en accaparer.

3ème Quand un parti ou un acteur politique se représente le lieu du pouvoir démocratique comme un lieu réel et un trône, et non pas comme un lieu métaphorique in-appropriable, il l’assimile à un territoire et à un trône à conquérir. Il conçoit alors la lutte politique comme une guerre de conquête territoriale et la prise du pouvoir comme prise d’un siège royal ou d’un sceptre de monarque.

4ème Quand un parti ou un acteur politique se représente le lieu du pouvoir démocratique comme une propriété et un territoire à conquérir, il le conçoit par la suite comme un patrimoine personnel, communautaire ou familial.

5ème Quand un parti ou un acteur politique considère le pouvoir démocratique comme un patrimoine personnel, communautaire ou familial, et le lieu du pouvoir comme un trône, il est conduit à récuser l’alternance du pouvoir ou à la concevoir sous la forme d’une succession héréditaire ou monarchique.

6èmeQuand un acteur ou un parti politique se représente le pouvoir démocratique sous les quatre formes précédentes, il tend à utiliser la puissance publique  comme une force matérielle au service des intérêts particuliers du chef de l’Etat  et du parti au pouvoir.

7ème Quand un acteur ou un parti politique se représente la puissance publique comme une force matérielle au service des intérêts particuliers du chef de l’Etat et du parti au pouvoir, il conçoit le pouvoir politique comme un instrument de domination. Il tend alors à utiliser la puissance publique contre ses adversaires politiques et contre le peuple pour assurer la pérennité de son pouvoir personnel.

Ces diverses représentations antidémocratiques du pouvoir conduisent aux conceptions antidémocratiques du gouvernement. Quelles sont donc les représentations du gouvernement et du peuple qui conduisent aux manières antidémocratiques de gérer le pouvoir ?

  1. Les conceptions antidémocratiques du gouvernement

8ème Quand  les acteurs politiques et le peuple  pensent  que  le chef de l’Etat est  dans une République, le représentant politique d’une communauté ethnique ou confessionnelle, ils assignent à l’élection politique républicaine et démocratique une  fonction de plébiscite. On va aux élections pour désigner, par acclamation unanime,  un  chef de communauté. Une telle représentation du chef de l’Etat et de la fonction de l’élection conduit à la pratique de la fraude électorale. Elle mène à la répartition ethnique ou confessionnelle de l’électorat lorsque le contrôle international des élections empêche la fraude électorale. Elle entretient la division du corps social.

9ème Quand  les acteurs politiques et les peuples se représentent le chef de l’Etat comme un chef communautaire et un démiurge, ils le déifient et ils organisent le culte de sa personnalité.

10ème Quand un parti ou un acteur politique se représente le pouvoir politique comme une propriété personnelle, comme un patrimoine communautaire ou familial, une source de rente et un instrument de domination, il considère logiquement le gouvernement comme un moyen de prédation personnelle communautaire ou familiale.

11ème Quand un parti ou un acteur politique conçoit le gouvernement comme un moyen de prédation personnelle, clanique, familial ou communautaire, il tend à instituer un gouvernement clanique, tribal, ou confessionnel.

12ème Quand un parti ou un acteur politique considère  le gouvernement comme un instrument de domination au profit d’une communauté ou d’une confession, il gouverne pour discriminer, dresser des barrières entre les peuples et exclure l’Autre.  

Ce mode de gouvernement procède d’une représentation communautaire ou confessionnelle du peuple démocratique. Quelles sont donc les manières de se représenter le peuple qui sont pour la démocratie un obstacle mortel ?

  1. Les conceptions antidémocratiques du peuple

13ème Quand un parti ou un acteur politique conçoit le peuple démocratique comme peuple ethnique ou peuple confessionnel, il mobilise le nationalisme comme instrument de conquête du pouvoir. Cette représentation du peuple mène à une représentation ethnique ou confessionnelle de la nation qui conduit à rejeter le principe de la citoyenneté.

14ème Quand un parti ou un acteur politique conçoit la nation comme communauté ethnique ou communauté confessionnelle, il se représente l’unité nationale sous le mode de l’homogénéité ethnique ou confessionnelle, et il est porté à réduire la lutte politique à un combat contre l’hétérogénéité et la diversité sociale.

15ème Quand un parti politique ou un acteur politique se représente l’Etat comme incarnation politique d’une communauté ou d’une confession, il récuse la légitimité de l’Etat républicain et démocratique et il en appelle au nationalisme communautaire ou confessionnel pour légitimer son combat. Il lutte pour porter au pouvoir le représentant d’une communauté.

16ème Quand  les partis et les acteurs politiques  d’une société multiethnique et multiconfessionnelle se représentent le système politique comme étant un système confessionnel ou ethnique, la lutte politique prend la forme d’une compétition pour le monopole ethnique ou confessionnel du pouvoir. La société se construit alors sur la base du principe de la particularité absolutisée. Elle s’édifie sur le  clientélisme, le népotisme et la corruption. (A suivre)

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