La maîtrise de la bataille politique, condition de la victoire du RHDP en Octobre 2015. (2ème partie)

Comment  faire en sorte que la société ivoirienne se réapproprie  le pouvoir après avoir été désappropriée par la dictature qui a gouverné la Côte d’Ivoire entre 2000  et 2010 ? Comment réconcilier les Ivoiriens qui avaient été discriminés, divisés et opposés les uns aux autres ? Tel est l’enjeu de la bataille politique à laquelle le gouvernement ivoirien, élu en décembre 2010, a tenté d’apporter des réponses à sa manière depuis son entrée en fonction en 2011. La reddition électorale des comptes exige donc qu’en soit donnée la justification discursive.

En attaquant le gouvernement sur les axes de la thématique de la réconciliation, de la proximité et de l’appropriation sociale du pouvoir, les adversaires politiques du gouvernement remettent en question sa prétention à avoir apporté des réponses satisfaisantes à ces problèmes politiques. Que la voie adoptée par le gouvernement ne soit pas celle de ses adversaires est compréhensible et de bonne guerre. Cette divergence est salutaire en démocratie. Une certaine confusion, entretenue par une certaine propagande, tendrait cependant à faire accréditer l’idée qu’aucune réponse ne fut apportée au problème de la réconciliation et de l’appropriation sociale du pouvoir en Côte d’Ivoire durant ces cinq dernières années. Un observateur extérieur impartial, jugeant objectivement à partir de l’épreuve des faits, ne souscrirait cependant pas à cette thèse.

Pour éclairer l’électorat ivoirien, il est donc important de tenter de rendre explicites les solutions qui furent choisies, afin d’évaluer le bien fondé de ces critiques. Toute œuvre humaine étant imparfaite, et la compétition démocratique  reposant sur des choix idéologiques partisans tranchés,  il est toujours nécessaire de critiquer les choix de l’adversaire politique, d’opposer à ses solutions, des solutions alternatives contradictoires. Cette confrontation des projets et programmes contradictoires dessine l’espace du débat et de la compétition démocratiques qui appellent chacun des protagonistes à se remettre en question pour  mieux  faire dans le service de l’intérêt général et du bien-être du peuple souverain. En dénonçant leurs limites inaperçues, le scalpel de la réalité se charge de démentir et de remettre en question les rhétoriques démagogiques et les projets idéologiques inopérants. Il permet aux politiciens raisonnables, soucieux de leur crédibilité, de réaménager  leurs solutions et de corriger leurs constructions idéologiques partisanes.

Comment le gouvernement ivoirien a-t-il donc tenté de résoudre, à sa manière, le problème de la réconciliation et de l’appropriation sociale du pouvoir, conformément à l’idéologie qui sous-tend son action politique ?

Il nous semble que le choix du gouvernement fut de résoudre le problème de la réconciliation au moyen de l’intégration de la société par l’économie. Il s’est agi, en ce choix, de donner économiquement du contenu à l’exigence démocratique de similarité qui fut brisée par l’ethno-nationalisme en Côte d’Ivoire. A cette politique de la réconciliation substantielle s’oppose naturellement la politique de la réconciliation artificielle de classe consistant à libérer les membres emprisonnés du FPI et à partager le pouvoir d’Etat avec eux  à travers un marchandage politique. Le choix du gouvernement fut au contraire celui de l’intégration socio-économique et politique de la diversité sociale.

 Selon ce choix, il fallait réunifier la nation par une politique d’investissement et de reconstruction des infrastructures pour retisser le lien social d’un peuple divisé, clivé et ségrégé. Sous la fièvre économique, s’est donc déclinée une politique de la présence d’un pouvoir soucieux de répondre aux besoins vitaux des peuples. Il fallait instaurer, au moyen de la reconstruction des infrastructures détruites, une dignité minimale des conditions de vie des populations. Cette médiation économique devait donner un contenu sensible au principe démocratique de la citoyenneté en lieu et place du principe ethnique de la nationalité qui avait instauré la discrimination, la ségrégation et l’exclusion entre les Ivoiriens. Cette politique économique était donc sous-tendue par une volonté d’appropriation sociale du pouvoir. Le souci gouvernemental fut aussi de faire en sorte que le peuple s’approprie le pouvoir, et que l’offre politique du gouvernement se construise à partir de la demande des peuples.

On peut y lire les traits d’une démocratie de proximité fondée sur l’interaction entre gouvernés et gouvernants. Cette démocratie de proximité à l’ivoirienne s’est déclinée sous la modalité de l’accessibilité, de la réceptivité et de la disponibilité du gouvernement au dialogue constructif impliquant toutes les parties prenantes du contrat-social. Sous les formes de l’empathie, de la compassion et de l’attention, elle s’est traduite par des actions caritatives massives en direction des plus faibles de nos concitoyens.

Comment répondre alors à la charge portée par l’opposition qui accuse le gouvernement d’avoir creusé la fracture sociale, de mener une politique plus soucieuse des intérêts sectoriels des multinationales que de la population ? Quelle réponse apporter à l’impatience  d’une population qui semble désespérer d’attendre les retombées sociales des fruits de la croissance ? (A suivre)

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