La nouvelle coalition ivoirienne d’opposition n’est pas représentative.

En démocratie républicaine, la représentation partisane est fondée sur trois principes : l’incarnation d’une idée de la citoyenneté, la défense des intérêts des acteurs sociaux  et le service du bien commun.La fonction des partis politiques est de médiatiser ces exigences, d’être les interprètes des principales catégories sociales de la nation, d’être  les porte-paroles de la volonté générale

A quelle idéologie et à quel programme politique renvoie donc le sigle des partis de la nouvelle coalition de l’opposition? Les Ivoiriens aimeraient en savoir plus sur l’obédience idéologique et le programme politique du PDCI de Charles Konan Banny et de Essy Amara, du Lider de Mamadou Koulibaly, du FPI des pros-Gbagbo, de l’UDL de Martial Ahipeaud, du CRI de Jean-Enoch Bah, du CPDL de Théophile Soko Waza, de l’ASD de Gervais Djah Galé et du CPR de Sébastien Sanou.

Quelle idée de la Côte d’ivoire ces divers partis prétendent-ils incarner ? Quels sont les intérêts et l’interprétation du bien commun qu’ils défendent ?Comment prétendent-ils médiatiser ces idées ? Comment chacun de ces partis compte-t-il porter à son niveau la volonté générale ?

Le porte-parole des partis de la coalition de l’opposition annonce une alternance politique idéologique et générationnelle. La teneur des diverses composantes de cette alternance n’est cependant pas explicitement formulée. Dans les jours à venir, il est à espérer que les acteurs de cette nouvelle coalition fournissent  aux Ivoiriens des réponses précises sur ce chapitre capital de la démocratie électorale représentative.

En attendant, cette clarification prévaut pour le moment la désagréable impression que l’on a affaire à la mise en place hâtive d’une coalition incohérente, informe, sans colonne vertébrale, sans programme politique, sans idéologie partisane claire. En face, le RHDP peut se targuer d’être une coalition partisane cohérente de la droite républicaine idéologiquement structurée. Un programme politique concurrentiel d’opposition doit se construire sur la remise en cause argumentée du modèle politique incarné par la coalition gouvernementale actuelle.

 A 7 mois de la présidentielle, le flou qui entoure le programme politique et idéologique de la nouvelle coalition peut donc être légitimement interprété comme le signe de l’incapacité des partis à mettre en forme de programme d’ensemble, leurs critiques ou leur projets. Or, cette incapacité atteste de l’inexistence pure et simple d’un projet de société  synthétique et unificateur constitué à partir de critiques fondées sur des expertises.

 Ce vide met en question  la représentativité de la nouvelle coalition. Sa légitimité démocratique ne devrait-elle pas reposer, comme il se doit en démocratie, sur sa capacité à intégrer les demandes sociales concurrentes de la minorité face à la majorité actuelle, à les médiatiser politiquement à travers un projet de société concurrentiel clair ?

L’absence du programme politique de la nouvelle coalition ivoirienne oblige à douter de la réalité de son enracinement social. Le flou programmatique, politique et idéologique, qui l’anime laisse plutôt entrevoir une coalition de factions et d’individus non représentatifs et sans projet qui se pressent avec avidité aux portes du pouvoir  comme au pied d’un mât de cocagne. Ce défaut d’enracinement social démocratique tend à prouver qu’en Côte d’Ivoire, la coalition de l’opposition est celle des factions d’une catégorie sociale dominante, dont les composantes s’affrontent pour s’approprier le pouvoir.

La polarisation de ces factions sur la crédibilité de l’élection présidentielle, la réduction du débat politique préélectoral à la discussion de l’impartialité de la CEI et de la transparence des listes électorales, peuvent être interprétée comme étant les indices d’une instrumentalisation de la légitimité électorale. L’objectif est moins d’affirmer la souveraineté du pouvoir constituant, que d’établir la crédibilité du processus qui conduit à l’attribution légale d’un mandat dont le bénéficiaire pourra user à sa guise au détriment du peuple en s’arcboutant sur la légalité de sa désignation. La transparence des élections n’assure dans ce cas que  la rigueur du processus de sélection d’une aristocratie élective qui tient les populations en tutelle dans les mailles d’un réseautage clientéliste de la société civile. La population apparaît, dans ce contexte, comme une ressource politique pour des acteurs politiques détachés des acteurs sociaux, au service de leurs propres intérêts particuliers de classe, travaillant à l’accroissement de leur propre pouvoir.

La thématique de la Présidentielle ivoirienne ne doit donc pas être limitée à l’organisation de la transparence des élections. Elle doit être recentrée sur la confrontation des programmes et des projets de société.

Plus encore que la légitimité électorale, l’aptitude des candidats à exercer la magistrature suprême doit donc être apprécié à l’aune de leur représentativité, et de leur capacité à défendre l’intérêt général, à servir les intérêts sociaux et  le bien commun. Le curseur de la campagne électorale ivoirienne doit donc être déplacé sur l’impératif démocratique de la légitimité substantielle qui oblige les candidats à bâtir leur campagne autour d’un programme politique clair. La campagne électorale de la Présidentielle ivoirienne doit être fondée sur les thématiques du service du bien commun et du respect des valeurs fondatrices du lien social.

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