A quand une marche républicaine à Abuja ? Le paradoxe africain après Paris, Maiduguri et Baga

Après la marche républicaine de Paris qui avait  pleinement révélé le caractère scandaleux  du silence de la communauté internationale face au drame nigérian, on s’attendait à une marche républicaine expresse de la communauté internationale  à Abuja!

On assiste, au contraire, à la mise en place laborieuse d’une riposte institutionnelle et militaire régionale  au djihadisme de la terreur de boko haram et à une certaine indifférence des sociétés civiles! De la même manière,  l’enthousiasme révolté du « Bring back our girls » avait vite cédé la place à l’indifférence et à un sentiment d’impuissance.

Après le rassemblement citoyen international auquel de nombreux Africains ont pris spontanément part pour défendre  les valeurs républicaines blessées,  on s’attendait à un rassemblement citoyen  transfrontalier en Afrique pour défendre la République et le respect de la dignité humaine contre la barbarie djihadiste et l’intégrisme confessionnel.

On a, au contraire, le spectacle étrange et inquiétant des manifestations « anti-Charlie hebdo » qui se révèlent être des manifestations vouées à la  défense du fondamentalisme confessionnel antirépublicain. Des marches anti-Charlie hebdo s’avèrent être des quasi-justifications des effroyables massacres perpétrés par le djihadisme de la terreur en Afrique et dans le monde.

Après s’être identifié à « Charlie hebdo » pour exprimer leur attachement aux valeurs de la république et de la laïcité de l’Etat, on s’attendait à ce que les chefs d’Etats africains, présents à la marche républicaine de Paris, initient à leur retour, une marche républicaine à Abuja sous le mot d’ordre « je suis nigérian ».

On les a vus, au contraire, se retrancher dans une représentativité confessionnelle, subordonner la République aux confessions en assimilant les caricatures à une injure à la religion et en cautionnant l’intolérance fondamentaliste.

Après la dénonciation transfrontalière  des effroyables massacres du djihadisme de la terreur à Paris,  on s’attendait à des manifestations de milliers de personnes dans tous les pays d’Afrique et d’ailleurs sous le slogan « je suis nigérian » pour dénoncer  les effroyables massacres du djihadisme de la terreur au Nigéria et en appeler à la solidarité envers les victimes de boko haram.

Dans les pays à majorité musulmane, on a vu, au contraire, des manifestations de colère de fidèles fanatisés   brûlant  des drapeaux français, attaquant les chrétiens, brûlant des églises et des locaux d’entreprises françaises.

Après la dénonciation de la présence des chefs d’Etat africains par des partis d’oppositions et une certaine intelligentsia dans certains pays d’Afrique sous l’accusation de l’allégeance à la France, on s’attendait à ce que ces partis et cette intelligentsia sonnent le branle-bas de l’engagement responsable effectif d’une Afrique Noire prenant son destin en main pour défendre la république et voler au secours de frères massacrés par le djihadisme de la terreur.

 On a vu, au contraire, ces partis d’oppositions et cette intelligentsia instrumentaliser politiquement l’affaire des caricatures, organiser des manifestations antirépublicaines aux côtés de clercs confessionnels intégristes. On a vu cette intelligentsia, indifférente aux effroyables massacres perpétrés au Nigéria, reprendre à son compte le slogan « je ne suis pas Charlie hebdo » à la tête de manifestations destinées à occulter le drame nigérian et à étouffer la dynamique de solidarité continentale envers les victimes. A la tête de manifestations à caractère confessionnel et intégriste, on a vu cette élite faillie opposer les musulmans aux chrétiens, soutenir une conception confessionnelle des identités et des nationalités, entretenir l’atomisation et la division sociale.

Au final, la condamnation du djihadisme de la terreur à Paris a conduit à sa justification et à sa légitimation en Afrique ! L’appel à la solidarité internationale dans la défense des valeurs républicaines a conduit  au refus de cette solidarité et à l’appel au rejet de ces valeurs. L’appel à la défense de la laïcité a conduit à l’appel à sa récusation  au profit de l’intégrisme et du fondamentalisme confessionnels. Il a conduit à l’alliance opportuniste entre l’anticolonialisme et le fondamentalisme confessionnel contre la République.

 La dénonciation et la condamnation des effroyables massacres du djihadisme de la terreur, qui devaient sceller l’union sacrée multidimensionnelle  du continent contre ce cancer, a conduit à la quasi légitimation de ces massacres et à la provocation de conflits artificiels entre les différentes confessions ! La dénonciation des effroyables massacres du  djihadisme de la terreur à Paris qui aurait dû jeter une lumière crue sur les effroyables massacres quotidiens infiniment supérieurs en nombre de Maiduguri, de Baga, de Postikum et d’autres localité du Nord du Nigéria, a servi à les occulter et à les relativiser.

Comment expliquer ce colossal et étrange retournement qui blesse le cœur et la raison ? Comment expliquer ce stupéfiant paradoxe africain ?     (A suivre)

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