Usurpation/ Augustin Dahouet, chef canton des Akouè ? Quand Bédié cautionne le faux.

Ambroise Tiétié

Journaliste Professionnel

Au Rassemblement (Quotidien ivoirien)

Il ne manquait plus que ça ! Mais comment s’étonner que Konan Bédié, chef de file des ivoiritaires qui voit derrière chaque étranger un ‘’ennemi’’ et pour qui la Côte d’Ivoire est en danger du fait de la présence massive des étrangers à qui on ‘’délivre des cartes nationales d’identité’’, soit la caution morale d’Augustin Dahouet ? Ce dernier qui se prend pour le chef canton des Akouè dispute ce titre avec le gouverneur Augustin Thiam, héritier putatif du père de la Nation et vrai détenteur du trône querellé.

Jusqu’où ira donc Henri Konan Bédié dans sa guerre contre le RHDP ? On le voit associer Augustin Dahouet prétendu chef canton des Akouè à toutes les cérémonies. Comme pour faire un pied de nez à la coalition au pouvoir dont est membre l’actuel chef canton des Akouè, Nanan Boigny N’Dri III. Ce sera encore le cas le dimanche 20 octobre 2019, au grand meeting  que prépare le PDCI-RDA à Yamoussoukro. On y verra donc en grande pompe le rival de Nanan Boigny N’Dri III, nom de règne du gouverneur Augustin Thiam, chef canton des Akouè reconnu à la fois par le droit coutumier et la justice ivoirienne ; puisqu’en avril 2017, la Cour suprême a débouté Augustin Dahouet dont la plainte a été jugée irrecevable par la juridiction suprême. Il n’empêche, le personnage continue de se prévaloir du titre de chef canton des Akouè avec la bénédiction de Bédié qui ne fait pas mystère de son soutien à l’usurpateur.

Récemment encore, les officiels du PDCI-RDA se sont rendus chez Augustin Dahouet pour lui présenter leurs civilités. Comment expliquer cette posture dans un pays dit de droit ?  En l’espèce, il s’agit moins de la continuation de la guerre que mène N’Zueba contre ses anciens alliés que de son aversion pour les étrangers. Car, s’il a pris fait et cause pour Augustin Dahouet dans la bataille contre Augustin Thiam pour l’occupation du trône des Akouè, c’est beaucoup plus parce que le second n’a pas le patronyme qu’il faut. Un Thiam ? Allons donc…

C’est beaucoup plus parce que le second n’a pas le bon patronyme

Et pourtant, Augustin Thiam est bel et bien l’héritier putatif du président Félix Houphouët-Boigny qui, de son vivant, a déclaré, à la face de la Nation et du monde entier, que ‘’ses héritiers sont les enfants Thiam’’ que le père Amadou Thiam a eu avec une nièce du grand homme. C’est une décision qui obéit au système de dévolution du pouvoir en pays akan, en général et baoulé, en particulier, où l’héritage se transmet par lignée matrilinéaire. En clair, chez les Baoulés, le pouvoir se transmet par les femmes. ‘’Dans notre famille, nous sommes quatre, mes deux sœurs n’ont pas d’enfants, tout comme l’une de mes cousines. Seule la plus jeune, Amoin, la fille de ma tante Yamousso, a pu en avoir. Grâce à Thiam, de par la coutume, ce sont eux mes héritiers directs’’, révélait Houphouët, en avril 1990. L’on croyait qu’à partir de cet instant, les choses étaient claires et que la succession cantonale ne connaitrait pas de problèmes. Las ! C’était compter sans Augustin Dahouet et sa génitrice HouphouëtBoigny Monique née Ouffouet Monique (un changement patronymique qui en dit long sur les prétentions du fils au trône des Akouè). Celle-ci se présente comme la fille d’Augustin Houphouet, frère du père de la Nation. Dès lors, il est clair que Dahouet qui descend de la lignée patrilinéaire est disqualifié pour occuper le trône des Akouè. Dans le cas  contraire, on ne voit pas pourquoi Houphouet, qui n’était pas stérile, n’a pas désigné l’un de ses enfants (il en avait plusieurs) pour lui succéder sur le trône querellé ?

A la vérité, la guéguerre Dahouet-Thiam entre en résonne avec la philosophie de Bédié qui n’a jamais accepté qu’un Thiam occupe le trône des Akouè. C’est tout le sens du soutien qu’il apporte au premier cité. Autrement, on remarquera que ledit soutien constitue un véritable ‘’parjure’’ pour quelqu’un qui se présente comme le dépositaire légitime de l’houphouétisme. Car, comment expliquer qu’il prenne le contre-pied des ‘’consignes’’ du président Houphouet qui a désigné ses héritiers de son vivant ? C’est une attitude qui pourrait apporter de l’eau au moulin de ceux qui soutiennent que le président du PDCI-RDA n’a jamais été un vrai houphouetiste. Et qu’il utilise l’houphouétisme comme un fonds de commerce. En tout état de cause, le cas Dahouet illustre à suffisance cette assertion.

Au final, la posture d’Henri Konan Bédié ne manque pas de choquer les bonnes âmes en même temps qu’elle questionne sa capacité à réconcilier les Ivoiriens. En effet, comment quelqu’un qui se met du côté des ‘’contrefacteurs’’ (une décision de justice a dénié au sieur Augustin Dahouet le droit de prétendre au trône) et dont le parti-pris en rajoute à la confusion, peut-il être le garant de la cohésion sociale ? Pour sûr, s’il advenait qu’il réoccupe la tête de l’Etat, ce serait la porte ouverte au désordre et au laisser-aller. Au surplus, quel crédit accordé à un homme qui cautionne le faux et qui semble n’en éprouver aucun scrupule ? C’est toute la question et elle est centrale. D’autant que le même serait encore à la manœuvre, à Sakassou, pour ‘’destituer’’ la reine des Baoulé Nanan Akoua Boni II qu’on dit proche du RHDP, au profit de son fils Nanan Kassi Anvo qui serait dans ses bonnes grâces. On le voit, la chefferie akan est prise en otage par le PDCI-RDA qui essaie de placer ses ‘’pions’’. En violation flagrante des us du pays akan. C’est du plus mauvais effet.

AMBROISE TIETIE

 

Les commentaires sont fermés