La réconciliation nationale : le travail de la démocratie.

En Côte d’Ivoire, la thématique de réconciliation nationale a été dévoyée et instrumentalisée. Certains acteurs politiques s’en servent pour justifier et négocier, dans une logique corporatiste, leur prétention patrimonialiste à l’exercice du pouvoir d’Etat.

Tour à tour, ces acteurs qui tiennent pourtant le discours clivant et désintégrant du nationalisme ethnique s’autoproclament réconciliateurs nationaux et revendiquent, à ce titre, le pouvoir d’Etat tout en récusant le programme d’intégration nationale qui permet d’inclure la diversité sociale et de construire l’unité politique du pays.

La guerre civile fut la conséquence d’un programme d’exclusion sociale et de désintégration nationale qui contredisait la logique démocratique de réconciliation de la pluralité sociale qui structure le vivre-ensemble.

La réconciliation nationale, y compris après une guerre civile, ne se réduit ni à un entre-soi entre dirigeants politiques, ni à des compromis discrétionnaires entre chefs de partis et chefs de fractions partisanes pour le partage patrimonialiste du pouvoir et la répartition équitable des privilèges afférents.

La réconciliation nationale s’effectue au quotidien dans le creuset du forum du débat démocratique et de la participation politique, à travers la négociation et le dialogue social qui permettent de réunir les points de vue contradictoires qui s’expriment dans la cité. Elle se réalise dans le travail de législation qui harmonise les particularismes sociaux et culturels en les subsumant sous une loi.

La démocratie pluraliste est pour cela un régime de réconciliation nationale des particularismes. C’est le régime de la loi. La Loi est le symbole et le médium du travail quotidien de réconciliation. Sa fonction est de réconcilier le particulier et le général. Le socle de cette réconciliation est le consensus de toutes les parties de la cité dans les valeurs et les principes de la République.

La réconciliation nationale se réalise à travers la législation qui harmonise les intérêts divergents, accorde les intérêts à court terme des acteurs sociaux et l'intérêt général à long terme de la société globale, règle les conflits sociaux par la négociation et le compromis.

L’Etat  est, dans une démocratie pluraliste, un service public de réconciliation nationale.  Sa fonction est d’inclure la diversité sociale et d’intégrer les parties de la cité. Les instruments fonctionnels d’inclusion et d’intégration nationale, qui est un travail de réconciliation de la pluralité, sont les partis politiques et les diverses institutions.

La fonction démocratique des partis dans leur rôle de médiation est d’exprimer les intérêts des diverses catégories de la cité afin de les accorder à la généralité. Leur attribution spécifique est de réconcilier le particulier et l’universel. Tel est le travail de l’élu qui, siégeant à l’Assemblée de la nation, construit la loi.

La réconciliation est la substance de l’Etat démocratique moderne qui organise la coexistence de la pluralité sociale en harmonisant à travers la loi les intérêts particuliers divergents et contradictoires qui s’expriment et s’affrontent dans la société civile.

Un gouvernement qui souscrit au programme de la démocratie pluraliste et met en œuvre un programme d’inclusion sociale et d’intégration nationale par la modernisation économique est, a priori, un gouvernement de réconciliation nationale.

Il est possible de déduire de cette démonstration que l’acteur de la réconciliation nationale en Côte d’Ivoire semble être la majorité RHDP qui souscrit au projet de la démocratie pluraliste et se revendique, par le discours et par l’action d’un programme d’inclusion sociale et d’intégration nationale.  

Il est possible, a contrario de déduire que les autocrates et les ethno-nationalistes  qui sont en porte à faux avec le programme général de la démocratie pluraliste sont dans l’imposture quand ils s'autoproclament réconciliateurs nationaux. Ces acteurs de division et d’exclusion ne sauraient, par définition, être des forces d’inclusion sociale et d’intégration nationale, des acteurs de réconciliation. Le bilan de leur performance entre 1995 et 2010 illustre par les faits, cette impossibilité. 

 

Les commentaires sont fermés