Ce qu’il en est de la notion d’étranger : une clarification indispensable en Côte d’Ivoire.

La notion d'étranger ne renvoie pas à la même réalité selon qu'on se trouve dans un État-nation ou dans un État qui reste ethniquement fragmenté ou dont la nation est en voie de construction.

Dans les États-nation, dans les pays qui ont réussi à rassembler et unifier les diverses collectivités culturelles du territoire et se sont, de ce fait, transformés en un corps politique lié par un sentiment d'appartenance commune citoyenne, l'étranger est de la nationalité d'un autre pays. Il vient de l'extérieur des frontières du territoire de l’État.

Par contre, dans les pays dont les différentes collectivités culturelles ne sont pas encore parvenues à se rassembler, à s'unifier et à constituer un corps organique lié par un sentiment d'appartenance commune citoyenne ; dans ces pays qui ne sont encore parvenus à se constituer en États-nation, ou dont les populations ont été fragmentées et atomisées par la colonisation, par des dictatures ou par des guerres civiles, l’étranger est le membre d’une autre communauté du pays, d’une autre collectivité ethnique ou confessionnelle du territoire. Il vient de l’intérieur du pays.

En parlant du droit des Ivoiriens à protéger leur pays contre les étrangers, les pro-bédié, les pros – Gbagbo, les pros – Soro, ces ethno-nationalistes et ces autochtonistes, qui se définissent comme "vrais ivoiriens", désignent comme étrangers les membres des autres communautés du pays. Ils parlent, qu'ils le euillent ou non, du droit de leur communauté ethnique à s'affirmer contre les autres communautés ethniques du territoire.

« Leur Côte d'Ivoire » est leur pays ethnique et leur communauté qu'ils définissent comme nation et dont les membres sont liés par un sentiment d'appartenance coutumière et lignagère structuré par le droit du sang.

En cette illusion d'optique, ces adeptes ivoiriens de la revendication identitaire qui se prennent pour des Donald Trump, des Marine Le Pen, des  Mario Salvini ou des Nigel Farage ivoiriens et qui légitiment leur position par référence à celle des identitaire des États-nation occidentaux ou asiatiques, ignorent que leur comparaison souffre d'un vice de forme. Ils ne savent pas que le pays qu'ils prétendent défendre contre une invasion étrangère n'est pas la République et l’État commun mais leur ethnie et leur chefferie contre les autres ethnies et les autres chefferies du territoire.

Les identitaires des États-nation sont des nationalistes qui désignent comme étrangers, les citoyens en provenance d’autres États. Ces nationalistes sont souvent des patriotes en ce qu’ils se définissent par leur propre État central dont leur nation est la fille.

Les identitaires des pays ethniquement fragmentés, par contre, sont des ethnicistes qui désignent COMME ÉTRANGERS LES MEMBRES D'AUTRES COMMUNAUTÉS DU MÊME TERRITOIRE SUR LEQUEL ILS VIVENT. Ces identitaires ethnicistes ne sont jamais des patriotes. Ils se définissent par leurs chefferies et leurs coutumes contre l'Etat central.

EN UTILISANT LA NOTION DE « JEUNE PATRIOTE » POUR DESIGNER SES MILICIENS, L’ETHNONATIONALISTE LAURENT GBAGBO ETAIT DANS L’IMPOSTURE.

Ces deux perspectives, CELLE DE L’ÉTAT-NATION ET CELLE DE L’ÉTAT ETHNIQUEMENT FRAGMENTÉ ET LES NOTIONS DIVERGENTES DE L’ÉTRANGER qu'elles véhiculent doivent être précisée en notre pays où prédominent la démagogie, la langue de bois, le dialogue de sourd et les invectives parce que nous désignons des réalités différentes par des mots similaires.

 

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