Côte d’Ivoire : voici pourquoi les promesses économiques et sociales du FPI et de ses alliés sont démagogiques.

N’est-il pas contradictoire de prétendre redistribuer les produits de la croissance au moyen d’un État communautaire anti-moderniste qui récuse, par principe, la production et la modernisation économique identifiées comme figures du néo-libéralisme corrupteur ?  

N’est-il pas contradictoire de prétendre détribaliser la société et le système politique au moyen du nationalisme communautaire qui en appelle à l’homogénéisation ethnique de la société et à l’appropriation de l’État par des autochtones ?

Comme l’attestent leurs discours et leurs pratiques, les forces dominantes de l’opposition ivoirienne sont, dans toutes leurs variantes, rassemblées dans le nationalisme identitaire et le populisme. Ces forces politiques  s’affirment comme anti-modernes et réactionnaires.

Les discours politiques de ces forces nationalistes ne portent pas sur la défense de la citoyenneté  et de l’hétérogénéité sociale, sur le service des intérêts et des besoins des diverses catégories sociales. Ces discours ne parlent pas de  modernisation de la société, de justice sociale, de gestion politique des transformations économiques en vue de sauvegarder  les libertés  et l’égalité des individus et des collectivités.

Les objectifs affichés dans ces discours confirmés par des pratiques, sont de prendre le pouvoir, de protéger des coutumes, de diviser la nation, de maintenir un statu quo qui préserve les inégalités et les hiérarchies traditionnelles, les privilèges et les intérêts acquis. Ces objectifs sont de protéger et d'assurer la prépondérance de partis définis comme patrimoines communautaires et propriétés privés, de défendre les intérêts particuliers des oligarchies qui les dirigent.

Le  programme politique des forces nationalistes qui dominent l'opposition ivoirienne n’est pas de promouvoir la production et les transformations économiques qui font changer la société. Il n’est pas de gérer politiquement les conséquences sociales de ces transformations afin d’améliorer qualitativement les conditions de vie des populations. Il n’est pas de soutenir l’émancipation économique et politique des acteurs sociaux. Il n’est pas de promouvoir le développement endogène du pays car ce développement résulte toujours comme le montre la sociologie politique « de l’abondance et du bon choix des investissements », de « la diffusion dans toute la société des produits de la croissance » de « la régulation politique et administrative des  changements économiques et sociaux au niveau de l’ensemble national considéré »

L’objectif politique du FPI et de ses alliés est au contraire de protéger une tradition communautaire contre le changement social, de récuser l'investissement et les équiments publics qui modifient les structures et permettent de briser les mécanismes de reproduction sociale . ( Cf: « on ne mange pas les ponts et les routes : les éléments de langage du national-populisme en Côte d’Ivoire ». Cedea.net, 25 Mai 2018.

Leur programme politique est de  défendre, en Côte d’Ivoire, la communauté contre la société, de protéger des « autochtones » contre des « étrangers », de défendre les identités communautaires contre la rationalité instrumentale de l’économie globalisée. Leur projet global est de reconstruire une identité communautaire contre les transformations technologiques et économiques.

Il semble alors que leur promesse économique de redistribution et leur promesse politique de lutte contre le tribalisme soient en contradiction avec leur vision du monde et soient de ce fait  purement démagogiques

N’est-il pas contradictoire de prétendre redistribuer les produits de la croissance au moyen d’un État communautaire anti-moderniste  qui récuse la production et la modernisation économique ?  

N’est-il pas contradictoire de prétendre détribaliser la société et le système politique au moyen du nationalisme communautaire qui en appelle à l’homogénéisation ethnique de la société et à l’appropriation de l’État par des autochtones ?

Comment redistribuer le produit national dans un État communautaire fondé dans une notion discriminante de la Nation et dans une abrogation de la représentativité sociale du parti et de l’État ?

 Comment redistribuer le produit national quand l’objectif politique de l’État n’est pas de servir les besoins existentiels et les demandes sociales de la population  mais  de défendre des coutumes et de reconstruire une identité contre des ennemis internes et externes dans un état de guerre permanent?

Comment redistribuer le produit national quand la redistribution est conçue en dehors de l’investissement qui est récusé parce que la production est considérée comme étant l’expression emblématique du libéralisme économique corrupteur et antisocial?

 Comment lutter contre le tribalisme quand on rejette le modèle démocratique et citoyen de la nation et de l’État au profit du modèle communautaire ?

Comment instituer un État citoyen au moyen d’un nationalisme communautaire qui en appelle à l’appropriation de l’État par une communauté d’autochtones  et à l’homogénéisation ethnique de la société ?

Les promesses des forces dominantes  de l’opposition ivoirienne rassemblées dans le nationalisme identitaire et le populisme anti-système sont donc contradictoires et impossibles à tenir. Ces forces récusent le régime économique et politique ainsi que les institutions afférentes qui permettent de les mettre en œuvre. Ces contradictions et ces impossibilités, se sont manifestées dans la gouvernance décennale du FPI  qui constitue un exemple historique en la matière.

La mise en œuvre du programme du national-populisme s’était traduite par la régression économique, par l’absence de redistribution et par l’explosion endémique subséquente de la pauvreté en Côte d’Ivoire. Au niveau politique elle s’était traduite par la tribalisation, la confessionnalisation sectaire de la société politique et la dérive terroriste de l’Etat.  

 

 

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