Réconciliation nationale, redistribution, lutte contre le tribalisme : colifichets démagogiques ou projets crédibles de l’opposition ivoirienne ?

L’opposition ivoirienne qui concentre ses attaques sur le volet social, économique et politique de la gouvernance du RHDP, n’hésitant pas parler d’échec total du gouvernement sur ces registres, se propose de prendre la pouvoir d’État pour résoudre efficacement ces problèmes.  

Qu’est-ce que les forces de cette opposition proposent donc, comme alternative politique, sociale et économique, aux Ivoiriens? Quelles sont leurs propositions respectives en matière de justice sociale, d’inclusion politique, sociale et économique? Que proposent-elles aux Ivoiriens en matière d’intégration et d’émancipation économique, autrement dit, de modernisation économique et sociale ? Comment et par quels moyens escomptent-elles résoudre ces problématiques ivoiriennes à partir de la perspective nationaliste et antilibérale qui est la leur?

Soulevons donc à la louche les problématiques de réconciliation nationale, de lutte contre la corruption, de redistribution des produits de la croissance et de lutte contre le tribalisme que ces forces enfourchent en qualité de cheval de bataille politique.

Passons en revue critique ces problématiques à l’aune de la vision de la vision politique et du projet sociétal du nationalisme dont elles se reclament.

Considérons d’abord les problématiques de réconciliation nationale et de paix civile.

Prônant la séparation et l’exclusion ethnique  comme en témoignent leur vision communautariste de la nation, le FPI et le PDCI et leurs divers satellites  peuvent-ils réconcilier la société ivoirienne qui est caractérisée sa diversité culturelle et confessionnelle? Étant donné que la division nationale et la guerre civile procédèrent de cette la mise en œuvre de cette conception communautariste de la société et de l’État, la société ivoirienne peut-elle être réconciliée par sa réédition ? La paix civile en Côte d’Ivoire peut-elle résulter de la vision belliciste d’Akossi Bendjo, de la vision guerrière et confessionnaliste de Simone Gbagbo ? Ces visions sont motivées par la défense d’une identité ethnique prétendument menacée par une soi-disant invasion étrangère. De nature stratégique et tactique, les déclarations lénifiantes de ces derniers jours des responsables du FPI ne doivent pas faire illusion sur ce sujet.

La réponse rationnelle à ces questions capitales ne peut donc qu’être forcément négative.

« La réconciliation national-populiste et ethno-nationaliste » vise à homogénéiser la société par ségrégation, exclusion et purification communautaire.

La réalisation de cette « réconciliation » passe nécessairement par la promotion et la protection étatique du crime communautaire. Elle s’accomplit à travers l’installation de la violence, des brutalités, des inégalités et de l’oppression au cœur de la société ivoirienne.

« La réconciliation nationale de type ethno-nationaliste et national populiste » est synonyme de séparatismes, d’irrédentismes et de guerre civile.

Venons-en maintenant à la problématique de la lutte contre la corruption.

Les forces du national-populisme et de l’ethno-nationalisme qui en appellent à la reconfiguration communautaire de la société et à l’installation d’un État communautaire, peuvent-elles lutter contre la corruption en Côte d’Ivoire ?

 Peut-on lutter contre les dynamiques d’accaparement privé du bien public au moyen d’un modèle politique fondé sur la confusion des systèmes et des pouvoirs ? Peut-on combattre la corruption au moyen d’un régime politique qui concentre les pouvoirs économiques, politiques et judiciaires dans les mains d’un chef tutélaire et d’un groupe restreint de personnes lui ayant fait allégeance ? Peut-on instituer la justice sociale au moyen d’un État communautaire dirigé par un parti d’oligarques lignagers restructuré sur le modèle de la défense clanique et patrimonialiste du Pouvoir d’État ?

La réponse rationnelle à ces questions capitales ne peut qu’être forcément négative.

L’arme fatale contre la corruption est la séparation moderniste des systèmes qui permet de rompre le lien organique primaire des sous-systèmes sociaux, et de séparer la société familiale, la société civile, la société politique et l’État. L’arme fatale contre les appropriations privées du bien public et les confiscations de la trésorerie nationale, c’est la séparation démocratique des pouvoirs qui repartit le pouvoir judiciaire, législatif et exécutif dans des institutions différentes, qui installe une société politique indépendante et autonomie au sein de laquelle les conflits d’intérêts se résolvent dans l’impartialité sous la régence de la Loi du droit positif.

On lutte efficacement contre la corruption par un approfondissement de la démocratie et par un perfectionnement des institutions qui permettent de garantir la défense de l’intérêt général et le service du Bien commun.

 On ne lutte pas contre la corruption au moyen de la confusion médiévale et réactionnaire des pouvoirs dans un Etat communautaire sous la direction d’un chef dictatorial et divinisé au-dessus des lois, d’un autocrate qui décrète le lynchage, l’ostracisation, la proscription des corrompus et leur exécution capitale sur la place publique.

Force est de constater que tel est le modèle démagogique proposé, à mots à peine couverts, par les forces de l’opposition ivoirienne conformément à leur vision communautariste de la société et de l’Etat. Elles se situent, par là, à mille lieux de la démocratie républicaine pluraliste et de ses valeurs.

Abordons maintenant les questions de la redistribution du produit national et de la lutte contre le tribalisme dont les forces de l’opposition se targuent de détenir,  en exclusivité, l’expertise. (A suivre)

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