Côte d’Ivoire : les leçons de l’accord de principe créant le parti unifié RHDP.

En considérant, sous la perspective  de la substance, cet  accord consacrant formellement l’avènement du Parti unifié RHDP, tirons-en les enseignements et les conséquences pratiques possibles.

L’accord de création du parti unifié innove en instaurant de nouvelles normes sur l’échiquier politique ivoirien. Il redonne la priorité  à  l’intérêt général et au Bien commun dans l’affrontement politique. Il montre que cet affrontement n’est pas seulement déterminé par les intérêts particuliers partisans et les stratégies d’appareils.

Cet accord fait voir que la justification première de la fonction des élus est de servir l’intérêt général. Ils n’ont pas vocation à servir leurs ambitions personnelles et leurs intérêts particuliers, ni exclusivement les intérêts de leurs partis respectifs. Ils doivent aussi servir l’intérêt supérieur de la nation ivoirienne, car ils représentent aussi la Nation et non pas seulement leurs électeurs. Cet exemple est un enseignement de patriotisme.

L’accord de parti unifié  donne  aussi à voir  l’idée selon laquelle une coalition inter-partisane est essentiellement programmatique et sociétale. Cette coalition est idéologiquement et politiquement fondée. En démocratie représentative pluraliste, on ne se coalise pas pour conquérir le pouvoir sans avoir un programme politique inclusif à réaliser parce que le pouvoir démocratique n’est pas une fin en soi. Les compromis, qui font taire les divergences, se constituent sur la base de ce programme politique qui fonde le consensus permettant de rassembler les divergences.

Lorsque l’affrontement politique est polarisé sur la conquête du pouvoir, et dénué de projet sociétal et de programme inclusif, il est nécessairement structuré par la division. Les partis restent figés dans leurs divergences  sans élément de médiation, sans un universel qui les rassemble.

En démocratie républicaine pluripartisane, les partis politiques sont les instruments institutionnels du service des intérêts sociaux. Ils réalisent cet office à travers le programme politique qui formalise les demandes de la société. Les coalitions inter-partisanes se constituent pour prendre le gouvernement de la Cité, afin de servir des intérêts de la société et travailler à l’inclusion et à l’intégration des membres du corps social. La réalisation de ce projet sociétal, sur le long terme, commande de dépasser la simple coalition par l’unification qui permet de conserver la majorité électorale.

L’accord de parti unifié schématise, en cela, le principe démocratique de subordination du pouvoir politique au pouvoir social, et réfute la thèse soutenue par les factions de l’opposition qui voyaient dans l’unification une restauration du parti unique en Côte d’Ivoire. Cet accord dément l’opinion selon laquelle les alliances inter-partisanes seraient commandées par des impératifs d’habileté manœuvrière et obéiraient exclusivement à des considérations de calculs  tactiques et stratégiques, qui permettraient de conquérir le pouvoir.  

Dans le sillage de ce démenti s’écroulent aussi une série de représentations politiques surannées et obsolètes. L’accord de parti unifié révoque la représentation du pouvoir d’Etat comme fin en soi. Il abroge la vision autocratique du Pouvoir comme instrument de domination de la société. Il démontre que  le pouvoir d’Etat est le moyen d’une fin plus haute qui requiert l’abnégation personnelle et l’abrogation des égos des acteurs politiques. Il faut porter les valeurs et le projet sociétal d’un parti politique et en être idéologiquement convaincu pour faire carrière, et prétendre le représenter à une élection présidentielle.  

Le pouvoir d’Etat se conquiert afin de mettre la puissance publique au service des populations. Le principe démocratique de limitation du pouvoir par les droits de l’homme, droits naturels parmi lesquels le droit des peuples à choisir leurs dirigeants figure en première place, formalise cette subordination du pouvoir politique à un principe juridique qui le dépasse. Le parti unifié RHDP est justifié par un programme politique et économique éprouvé dans une gouvernance. C’est un bloc partisan au moyen duquel  les libéraux ivoiriens  espèrent  conserver la majorité électorale afin de servir un projet sociétal d’inclusion.

Ainsi, sont aussi révoqués, en Côte d’Ivoire, les modèles autocratiques de la conquête du pouvoir par dévolution monarchique, par héritage patrimonial et par violence insurrectionnelle. Ainsi, il est aussi démontré, à travers l’exemple de cette alliance programmatique, que les dissidences partisanes doivent être justifiées par des positionnements idéologiques et programmatiques de rupture, tels qu’Emmanuel Macron en a donné l’exemple en France, en tentant un alliage inédit du socialisme et du libéralisme. Dans l’exemple macronien, il n’est nullement question de transition générationnelle, de leader générationnel ou d’homme providentiel.

De ce point de vue, l’accord de parti unifié initie, en Côte d’Ivoire, une possibilité de révolution de nos mœurs politiques nationales. Cet accord de principe ne peut que se concrétiser, grâce à la conviction démocratique de ses auteurs et de ses acteurs.

 

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