Réforme de la Constitution ivoirienne. Le sens des états généraux de la République.3/3

ConseilConstitutionel Le temps de la catharsis collective et de l’aggiornamento.

La réforme libératrice, visée par le réaménagement de Constitution, devra reposer sur une volonté endogène individuelle et collective concertée de libération. Il faut vouloir vivre dans un Etat de droit fondé sur une culture de la liberté. C’est dans cette optique que la tenue des Etats généraux de la République s’avère incontournable et indispensable.

Au gué du deuxième mandat du Président Alassane Ouattara, ces états généraux qui étaient  prématurés au sortir de la crise, et durant son premier mandat, sont maintenant circonstanciellement opportuns. La présidentielle de 2015 a confirmé la légitimité d’administration que le Chef de l’Etat ivoirien  avait conquis par sa gouvernance durant les cinq années de sa 1ère mandature. La productivité démocratique et économique de sa gouvernance est maintenant largement reconnue au plan national comme l’a confirmée l’élection présidentielle de 2015 et au plan international comme en témoigne le satisfecit politique et économique décerné par la communauté internationale. S’impose alors l’exigence de revenir sur le passé pour garantir les acquis du présent et pour  préparer l’avenir. Il est désormais temps d’engager institutionnellement et formellement le débat public, dans un cadre dédié spécifique, pour savoir comment on aurait pu faire mieux, et ce qu’il faire désormais pour éviter durablement les égarements du passé. De ce point de vue, l’objet des états généraux de la République ne saurait consister à remettre en cause la légitimité du gouvernement. Cet aspect de la question est fondamental et capital. En Côte d’Ivoire, la légitimité des états généraux de la République dépend de ce consensus sur la légitimité absolue du chef de l’Etat et de son gouvernement.

En appeler à un  bilan de la crise qu’a connue le pays, c’est en appeler plutôt  à une autocritique individuelle et collective, et non pas à la remise en cause de la légitimité du gouvernement qui la détient du peuple et de l’élection ; c’est porter à la conscience à travers le débat public,  les conduites individuelles et collectives qui ont conduit à la crise politique et à la guerre civile en Côte d’Ivoire ; c’est appeler à une catharsis  collective indispensable qui libère la Côte d’Ivoire de ses démons internes.

Ces états généraux de la République seront l’occasion de révoquer collectivement la culture de prédation et d’exclusion. Ces deux maladies psychologiques génétiques des Etats postcoloniaux africains, qui sont donc  aussi les nôtres en Côte d’Ivoire, furent les racines de la crise politique que nous vécûmes. Il s’agit, à travers le débat autocritique rationnel public, de nous libérer de notre tendance à fétichiser le Pouvoir d’Etat et le représenter comme un patrimoine personnel ou communautaire ; de révoquer en nous  la volonté d’accaparement et de prédation, de nous débarrasser de notre habitude à faire du bien public notre propriété privée. Il s’agit de cautériser, par la parole autocritique qui justifie la sanction juridique, cette source de corruption sociale, économique et politique. Le débat public républicain aura pour objet de révoquer de la cité la culture de d’exclusion, le communautarisme,  le refus de la reconnaissance de l’Autre, l’irresponsabilité des acteurs politiques et leur tendance à refuser l’exigence de reddition des comptes devant le peuple souverain.  

Il s’agit donc, par la parole et le dialogue autocritique, d’expulser de la cité les miasmes produits par les démissions individuelles et collectives que nous avons jusque-là consciemment ou inconsciemment dissimulés dans les replis de notre corps politiques en désignant des boucs émissaires, les étrangers, le néocolonialisme, le capitalisme et la finance internationale. Les Etats généraux de la République ne sont rien d’autre qu’une catharsis collective qui permet de guérir psychanalytiquement la Côte d’Ivoire des maladies psychologiques génétiques des États postcoloniaux africains qui plombent leur présent et grèvent en permanence leur futur. (A suivre)

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