Les leçons de l’élection présidentielle ivoirienne d’octobre 2015. 1ère partie

L’élection ivoirienne s’est achevée sur le mode d’un plébiscite du candidat du RHDP par le peuple. En ce résultat (83,66 %) des urnes, la majorité des ivoiriens  salue  manifestement les performances économiques d’un candidat qui a réussi à relever, avec panache, le défi adressé par Laurent Gbagbo au sortir de la crise post-électorale en 2010: reconstruire le tissu économique en lambeaux de la Côte d’Ivoire et assurer la sécurité de tous les ivoiriens. Au lendemain de sa défaite électorale et militaire, Laurent Gbagbo avait mis son adversaire au défi de conquérir, par une légitimité d’administration, sa légitimité électorale contestée et récusée. Le succès d’Alassane Ouattara dans cette épreuve de la légitimité d’administration entre 2010 et 2015 a donc pleinement consacré  une légitimité multidimensionnelle exprimée par le message des urnes le 25 Octobre 2015. La victoire électorale quasi plébiscitaire du candidat du RHDP à un taux de 83,66%, et le taux de participation de 52,86%  obtenu dépit du mot d’ordre de boycott  lancé par la frange extrémiste du FPI, comportent en cela un certain nombre d’enseignements capitaux  qu’il importe de faire ressortir.

Le plébiscite du modèle d’intégration de la société par l’économie choisi par le candidat du RHDP.

En ce succès électoral éclatant du candidat Alassane Ouattara, il faut voir le plébiscite de son modèle d’intégration et de réconciliation de la société par l’économie, c’est-à-dire au moyen du développement endogène. Le choix de ce modèle par le gouvernement est destiné à retisser,   grâce à un programme économique efficient, l’unité brisée de la société. Ce programme devrait ouvrir la porte à la redistribution des produits de la croissance et permettre de résorber le chômage pour faire reculer la poussée identitaire en Côte d’Ivoire.

L’intégration professionnelle permet en effet à chaque citoyen de se définir par ce qu’il fait et non plus par ce qu’il est. Elle lui permet de se définir par sa profession et non pas par son identité culturelle. Cette intégration économique de la diversité sociale donne du contenu aux principes démocratique et républicain de similarité et d’égalité de condition. Le modèle d’intégration et de réconciliation par le développement endogène  a donc été choisi par le gouvernement ivoirien en raison de son efficience. Le modèle d’intégration de la société par l’idéologie et la politique, a été  rejeté pour la simple raison qu’il est, au contraire, inefficient et démagogique. Modèle préféré des autocrates, il permet d’accroître l’emprise du pouvoir politique sur la société. Il permet d’accroître une politique d’exclusion, de dissimuler la domination politique sous une effusion de bons sentiments et de discours démagogiques sur l’unité et la cohésion sociale.

Ce que certains qualifient  d’échec politique du gouvernement ivoirien sur le chapitre de la réconciliation, relève donc d’un point de vue fondé sur un habitus culturel africain  qui donne la priorité à l’idéologique et au politique sur l’économique. Cet habitus ancien qui entretient les dominations politiques et les déprédations économiques, doit être révoqué pour que l’Afrique Noire puisse s’engager pleinement dans la modernité politique et économique. La victoire quasi plébiscitaire du candidat du RHDP exprime donc  une adhésion populaire au modèle d’inclusion et d’intégration de la diversité sociale par l’économie.

Le taux de participation  de 52,86%  signifie le rejet  de l’appel au boycott lancé par le FPI tendance-Sangaré. Il exprime une demande populaire de République et de reforme constitutionnelle. 

L’échec de l’appel au boycott exprime un rejet populaire du modèle d’intégration par l’idéologie et du modèle communautariste de la société. Il traduit un besoin populaire de République. Affi N’guessan doit être félicité pour son fair-play démocratique qui permet à la Côte d’Ivoire de rompre avec le passé. Il faut néanmoins lui rétorquer que son inquiétude légitime quant à la santé de la démocratie ivoirienne qui serait d’après lui  menacée  par le positionnement ethnique de l’électorat du nord,  rend plus que nécessaire son engagement républicain en tant que nouveau chef légitime de l’opposition ivoirienne. Les taux records du vote des populations du nord en faveur du candidat du RHDP répondent tout simplement et logiquement aux taux records d’abstention dans les régions communautairement contrôlé par le FPI extrémiste et ses divers satellites, un contrôle communautaire dont Affi N’guessan a lui-même été la victime. « J’ai voulu le voter », avoue une habitante de Mama, en parlant de Pascal Affi N’Guessan, « mais on m’a dit que c’est un vendu donc c’est pas la peine ». Autour d’elle, un groupe d’hommes acquiesce. » fait remarquer le journal  Jeune Afrique en sa parution du 25 Octobre dernier. Au FPI, le mot d’ordre de boycott fut respecté par une frange d’un électorat sous emprise, communautairement, contrôlé et encadré  qui avait été auparavant encouragé par le parti et ses satellites à détruire les infrastructures économiques et à tourner en dérision la politique d’investissement. L’article 35 de la Constitution qui a soutenu la politique d’exclusion  mise en œuvre par le FPI, a entretenu une  polarisation ethnique de l’électorat en Côte d’Ivoire, menaçant à la fois la Démocratie et la République. Le taux de participation de 52,86% exprime donc une demande populaire de République qui doit être impérativement  satisfaite par une reforme Constitutionnelle (A suivre)

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